En 2030, les baby-boomers seront devenus des papy-boomers – essentiellement des mamy boomeuses– en rejoignant la tranche des 80 ans et plus. En 2060, un tiers de la population aura plus de 60 ans. C’est le scénario central établi par l’Insee fin 2010. Et la moitié d’entre elles dépassera les 75 ans. Sans surprise, le nombre de personnes âgées dépendantes va lui aussi fortement croitre.
2,3 millions de Français seront dépendants en 2060
L’observation des projections relatives aux bénéficiaires de l’Allocation personnalisée d’autonomie (Apa), permet de constater que l’on comptait, début 2012, 1,2 million de bénéficiaires de l’Apa, dont 64% classés en GIR 3 et 4 (*) conservant une relative autonomie. Au total, 60% vivaient à domicile et 40% en établissement. Entre 2012 et 2060, le nombre de bénéficiaires de l’Apa devrait doubler et ainsi passer à 2,3 millions de bénéficiaires.
Dégradation du ratio aidants-dépendants
Le vieillissement de la population se traduit par un nombre croissant de personnes dépendantes. Le souhait de nos ainés, encouragé par nos politiques, est de rester le plus longtemps chez eux. La perte graduelle d’autonomie se traduit par le besoin de mobiliser un nombre croissant d’aidants pour permettre le maintien à domicile. L’un des soucis notés par l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE) est le vieillissement de l’entourage des personnes âgées dépendantes. Quand les baby-boomers passent du statut d’aidant à celui de personne âgée, voire dépendante, se pose le problème de la prise en charge des aidés. Le vieillissement de la population, l’allongement de la durée de vie des personnes aidées, la baisse de la fécondité depuis 1975 : autant de facteurs contribuant à la dégradation du ratio aidant-aidé.
Cette situation est d’autant plus problématique pour les femmes âgées dépendantes. Au sein d’un couple, 56% des hommes sont plus âgés que leur compagne. Avec en moyenne deux ans et demi de plus que la partenaire et 8% des couples dans lequel la différence d’âge est de dix ans et plus. L’INSEE constate qu’au fur et à mesure des décennies, l’écart d’âge devient de plus en plus grand.
L’espérance de vie d’un homme est par ailleurs de 6 années de moins que celle d’une femme. L’espérance de vie à la naissance atteint 79,5 ans pour les hommes et 85,4 ans pour les femmes (2018, France métropolitaine).
Ces deux facteurs expliquent que seulement 19% des femmes vivront encore avec leur conjoint en 2040, contre 54% des hommes.
Ce pourcentage très important de veuves âgées se traduit par une pression accrue sur les enfants de ces femmes (en premier lieu sur les filles), qui eux-mêmes sont aidants à un âge de plus en plus avancé.
Explosion du nombre de résidents en EPHAD
Avec le doublement attendu du nombre de personnes dépendantes entre 2012 et 2060 et en conservant la répartition actuelle entre maintien à domicile et placement en établissement, ceci donnerait 1,4 million de personnes dépendantes à domicile et 900 000 en établissements (principalement EPHAD) dont 80% en GIR 1 et 2 (*) c’est-à-dire en situation de grande dépendance. Le taux de croissance attendu pour les EPHAD devrait être de 2.2% par an. Cela conduira à une augmentation de 350 000 résidants d’ici 2040.
Une France de séniors
Pour la France, en 2017, le solde naturel (différence entre les naissances et les décès) est au plus bas niveau depuis 1945 :
- 767 000 naissances en 2017 (et un taux de fécondité en baisse régulière à 1.88 enfant contre 1.92 en 2016),
- 630 000 décès en 201 et en légère progression par rapport à 2016.
Le mécanisme du vieillissement de la population française est bien ancré. Il correspond à un phénomène durable et touchant les pays les plus riches, y compris la Chine. Ironiquement nous pourrions recommander de transformer les crèches en EHPAD. Les nounous en dames de compagnie. Les fabricants de poussettes en fabricant de déambulateurs ! Dans les faits, l’on va observer un transfert des sommes consacrées à l’enfance vers les dépenses liées au grand-âge. Assurer une fin de vie confortable aux séniors est louable d’un point de vue sociétal. Mais on ne peut qu’être inquiet pour le dynamisme économique d’un pays de vieux.
Marc Sevestre