Le virus circule activement sous des formes de plus en plus contagieuses à mesure de l’arrivée de nouveaux variants. L’opinion, dans sa grande majorité, est résignée à l’annonce d’un nouveau confinement. Certes, la population est lassée, mais l’urgence sanitaire comprise. Après avoir affirmé à longueur d’interventions que les choix sanitaires l’emporteraient sur les conséquences économiques, le Premier ministre prend tout le monde à contrepied en présentant quelques « mesurettes » supplémentaires. Pour presque tous, il s’agit d’un pari perdu d’avance.
Tout ça, pour ça
Fermeture des frontières hors UE (plus de vacances lointaines pour les plus chanceux) et des centres commerciaux non-alimentaires de plus de 20 000 M2. Tout cela s’apparente à un coup d’épée dans l’eau. Si au moins, une logique s’imposait. Bannir un visiteur en provenance d’Asie et laisser ouverte les frontières avec l’Irlande ou le Portugal, alors que la circulation du virus entre ces différentes zones est sans aucune mesure, n’a pas de sens sanitaire.
Les experts de santé le disent haut et fort « Nous allons droit dans le mur ». Sentiment partagé par le plus grand nombre. Mais, le Président pourra affirmer, lorsqu’il prendra sous peu la parole, qu’il aura tout fait pour éviter un troisième reconfinement. Très prochainement, les hôpitaux seront totalement saturés, les nouveaux cas et les décès quotidiens atteindront des niveaux effrayants. Mais quand le Chef de l’Etat s’adressera aux Français dans une allocation solennelle, avec un retard lourd de conséquences sanitaires, il pourra les regarder « droit dans les yeux ». C’est le cœur gros qu’il pourra affirmer qu’il doit se résoudre à mettre en place un troisième confinement. Il ne manquera pas de qualifier cette mesure d’archaïque, de moyenâgeuse, de décision de dernier ressort. Il s’en remettra au civisme et à la résilience de tous qui permettront de retrouver, à n’en pas douter, des lendemains heureux.
Respect des règles
Pourquoi ajouter à la privation de libertés, un sentiment d’injustice ? Les dérives d’un petit nombre créent un sentiment de grande frustration chez beaucoup. Si déjà le couvre-feu et les mesures en vigueur étaient respectés. Si les contrôles étaient effectifs et rigoureux, la peur du gendarme dissuasive, les abus systématiquement réprimés, cela apporterait une impression de cohérence. Nombreux le disent, le deuxième confinement n’a presque rien changé pour eux. Pourquoi ne pas se retrouver en famille ou entre amis le soir, car il est facile de passer au travers des mailles du couvre-feu ?
Certes la décision de mettre le pays « sous cloche sanitaire » est lourde de conséquences, mais « reculer, c’est mieux sauter ». La politique de l’autruche n’en est pas une. Dès lors, une seule voie. Courage, confinons.
Quoi qu’il en coûte
Un milliard. Un petit milliard ! Il suffirait d’augmenter de dix euros le prix d’achat d’une dose unitaire de vaccins pour l’emporter sur d’autres pays (Etats-Unis, Israël, UK,). Pour vacciner cinquante millions de Français (largement suffisant pour atteindre l’immunité collective) et donc acheter cent millions de doses, le coût ne serait donc que d’un milliard d’euros. Peut-être 0.2% de ce que devrait coûter in fine la crise à notre pays.
Aveuglement étatique contre pragmatisme de certains dirigeants pour qui « nécessité, fait loi ». Peut-on confiner le pays, sans un horizon clair de sortie de la crise sanitaire ? Les ratés en ce début de campagne de vaccination ne renforcent pas la confiance envers le pouvoir exécutif dans la gestion de la crise.
Reste la question du « chacun pour soi ». Les surenchères pour les masques sur le tarmac, l’ouverture des domaines skiables dans certains pays de l’UE, deux anecdotes sur la longue liste illustrant l’absence de cohésion. La crise sanitaire montre bien que, sous la menace, l’instinct de survie et la préférence nationale sont des valeurs plus prégnantes que le principe d’idéal universel. Pour preuve, le cri d’alarme de l’OMS pour l’accès aux vaccins des pays les plus pauvres.
Marc SEVESTRE